Les camps de réfugiés grecs face au confinement
Placés dans des camps situés aux portes de l’Europe, les migrants n’ont d’autres choix que de patienter là pendant des mois, voire des années. Bloqués sur les îles grecques ou en Grèce continentale, ils espèrent obtenir l’autorisation d’entrer. Leur situation dans ces camps est, comme nous le savons, des plus précaires.
Un Hotspot surpeuplé, le camp de Moria sur l’île de Lesbos
Les camps situés sur les îles de Lesbos, Chios, Samos, Kos et Léros sont nommés « hotspots » et ont été mis en place par l’Union Européenne en 2015.
Ceux-ci sont les premiers lieux d’accès à l’Europe pour les migrants et demandeurs d’asile arrivés par la Turquie. Ces hotspots ont pour vocation d’organiser la répartition des réfugiés dans les différents pays de l’Union Européenne, mais aussi d’assurer l’identification et l’enregistrement des individus. Les migrants ne sont pas autorisés à entrer sur le continent européen avant que la décision finale concernant leur demande d’asile soit prise. Ces hotspots grecs hébergent aujourd’hui 36 000 demandeurs d’asile.
Sur l’île de Lesbos, dans le camp de Moria, les migrants vivent tente contre tente au milieu de montagnes de déchets. A l’origine ce camp fut créé pour accueillir 2800 personnes. Ils sont aujourd’hui 20 000 dont 40 % de mineurs, essentiellement afghans et syriens, à s’y entasser.
L’accès à l’eau y est difficile. En effet, dans certains quartiers du camp il n’y a qu’un robinet d’eau pour environ 1300 personnes. Egalement, les robinets délivrent seulement de l’eau froide et celle-ci est coupée l’après-midi. En ce qui concerne les douches, il y en a une pour 240 personnes, il faut donc faire la queue pendant des heures, et c’est la même chose pour les toilettes.
Mais ce n’est pas tout : les gens doivent faire la queue également entre une heure et demie et cinq heures lors de la distribution des repas. Il n’est pas rare qu’un père de famille retourne vers sa tente sans nourriture car il n’y en avait plus lorsque son tour est arrivé.
C’est également une longue file d’attente (environ 100 à 200 personnes par jour) pour consulter un médecin. Ceux-ci ne sont présents que quelques heures par jour dans le camp. Ils ne traitent pas les maladies chroniques. Depuis le coronavirus, les médecins n’examinent que les personnes qui toussent ou éternuent. Dans ces files d’attente interminables, il est impossible de respecter la distanciation sociale. De même, les gestes barrières sont difficiles à instaurer alors que les accès aux robinets d’eau sont limités.
Les autorités grecques avaient annoncé le 27 mars les mesures prises pour lutter contre la pandémie dans ces hotspots.
Dans ces camps, une seule personne par famille était autorisée à sortir pour se procurer de la nourriture. Le nombre de personnes total qui pouvaient se rendre à l’extérieur était limité ainsi que la venue des ONG et des personnes extérieures. Enfin, les services éducatifs et autres activités avaient été suspendus.
Aucun cas de coronavirus n’a pour l’instant été détecté dans ce camp de Moria.
Camps de Ritsona et Malakasa placés en quarantaine
En revanche, des migrants ont été testés positifs au Covid-19 dans deux camps de Grèce continentale, au nord d’Athènes. Ces camps ont été placés en quarantaine.
Le premier cas s’est déclaré dans le camp de Ritsona à 70 km au nord d’Athènes et comptant 2700 résidents. Une demandeuse d’asile a été testée positive après avoir accouché dans un hôpital de la ville le 28 mars. Après ça, les autorités sanitaires ont décidé d’effectuer des tests sur tous les résidents du camp. Une vingtaine de personnes ont été déclarées positives au virus, mais étaient asymptomatiques. Elles ont été évacuées du camp.
Le camp de Malakasa avait également été placé en quarantaine pendant quinze jours, suite à la détection d’un cas.
En tout, près de 200 demandeurs d’asile ont été testé positifs au Covid-19 sur le continent grec.
A la mi-mai, deux demandeurs d’asile fraîchement arrivés sur l’île de Lesbos ont été testés positifs. Ils ont été placés en quarantaine, tout comme les soixante-dix personnes qui avaient débarqué sur l’île avec eux. Ils ont été placés dans une structure à plusieurs kilomètres du camp de Moria, au nord de Lesbos.
Évacuation des mineurs isolés et des plus vulnérables
Le 6 mars, la Commission Européenne a décidé que 1600 mineurs isolés seraient transférés dans différents pays européens pour soulager les îles grecques. Ils sont 5500 mineurs isolés à vivre dans ces camps insulaires.
Huit pays européens ont accepté de les accueillir : la France, l’Allemagne, le Luxembourg, le Portugal, la Finlande, la Lituanie, la Croatie, l’Irlande.
Le transfert a commencé le mercredi 15 avril. Ce sont douze jeunes afghans et syriens âgés de 11 à 15 ans qui sont arrivés au Luxembourg. Ils viennent de différents camps sur les îles de Lesbos, Chios et Samos.
De même, l’Allemagne a accueilli en Basse Saxe 47 migrants mineurs le samedi 18 avril. Ceux-ci sont originaires de Syrie, d’Afghanistan et d’Érythrée. L’Allemagne souhaite accueillir 500 mineurs isolés en tout.
La commissaire aux affaires intérieures de l’Union Européenne a annoncé le 2 avril, qu’une partie de l’aide financière versée à la Grèce serait réservée à financer l’hébergement temporaire des migrants vivants dans les camps sur les îles de la mer Egée. Le but étant de les transférer vers des hôtels sur place ou de les envoyer sur le continent.
En réponse à cela, le ministère grec en charge des migrations a annoncé le 16 avril que 2380 migrants issus des camps de Lesbos, Samos et Chios seraient évacués vers des hôtels. La priorité est au transfert des personnes de plus de 60 ans, mais aussi les personnes souffrant de maladies antérieures à l’épidémie.
En revanche, le plan ne répond pas au manque d’eau, de soins médicaux et d’articles d’hygiène.
Conclusion
Les conditions au sein des camps sont déplorables. Les réfugiés ne bénéficient pas de suivi médical, sont mal nourris et manquent d’hygiène.
Qualifiés de « bombe sanitaire » selon le porte-parole du gouvernement grec Stelios Petsas, ces camps n’ont pas du tout été préparés à subir l’impact de la crise sanitaire de la Covid-19. Confinement et virus accentuant encore les conditions de vie si précaires menées par les migrants.
Les camps de migrants en Grèce sont toujours en confinement jusqu’au 21 juin. Celui-ci a déjà été prolongé deux fois alors que le pays a été déconfiné le 4 Mai.